Égypte : Gamal et Alaa Moubarak photographiés aux Émirats après des années d’interdiction de voyager
Les fils de l’ancien président égyptien Hosni Moubarak ont été photographiés à Abou Dabi, aux Émirats arabes unis, lundi, leur premier voyage à l’étranger depuis la révolution de 2011 qui a renversé leur père.
Gamal Moubarak est apparu sur des photos serrant la main du nouveau président des Émirats arabes unis, Mohammed ben Zayed, tandis que des dirigeants du monde entier se sont rendus dans ce pays du Golfe pour présenter leurs hommages après le décès de l’ancien président Khalifa ben Zayed al-Nahyane.
Ces photos ont soulevé des questions sur la façon dont Moubarak a pu quitter l’Égypte malgré une interdiction de voyager de longue date édictée contre les membres de la famille.
Mardi, le quinquagénaire a publié un communiqué vidéo indiquant que sa famille avait été blanchie des accusations de corruption portées contre elle à l’international au lendemain du soulèvement prodémocratie de 2011.
Cette vidéo survient après l’abandon par les procureurs fédéraux suisses d’une enquête de onze ans sur des présomptions de blanchiment d’argent par des Égyptiens proches de Hosni Moubarak lors de la révolution, dégageant des millions de dollars pour la famille de l’ancien homme fort. Moubarak est mort en 2020 à l’âge de 91 ans.
« Impunité »
Le jugement suisse fait suite à une décision de la Cour européenne de justice le 6 avril de confirmer une décision jugeant illégales les sanctions européennes contre Moubarak et sa famille et ordonnant à l’Union européenne de payer les frais de justice engagés par les Moubarak.
« Les faits sont désormais établis et les fausses allégations ont été réfutées sans équivoque. L’histoire a donc été corrigée de manière indépendante et judiciaire », déclare Gamal Moubarak dans un communiqué en anglais posté sur YouTube.
Selon Transparency International, on estime que, lorsqu’il était président, Hosni Moubarak « a volé près de 70 milliards de dollars de fonds publics aujourd’hui cachés en France, en Allemagne et en Espagne »
Selon Transparency International, on estime que, lorsqu’il était président, Hosni Moubarak « a volé près de 70 milliards de dollars de fonds publics aujourd’hui cachés en France, en Allemagne et en Espagne ».
Cette organisation internationale contre la corruption a déclaré que la décision de la Cour européenne « montre l’impunité des acteurs corrompus ».
Dans son communiqué, Gamal Moubarak dénonce « la campagne médiatique internationale constante de fausses allégations de corruption qui a été lancée contre sa famille il y a près de dix ans. » Il critique également les autorités égyptiennes qui les ont poursuivis devant les tribunaux internationaux pour récupérer les fonds présumés volés.
« Nous sommes pleinement engagés à défendre notre position exclusivement devant la justice égyptienne », assure-t-il.
« Mais les autorités égyptiennes nous ont forcé la main, en prenant la décision délibérée de nous poursuivre devant les juridictions américaines et internationales. Ces poursuites acharnées étaient fondées sur le prétexte faux et scandaleux de fonds présumés pillés ou siphonnés par ma famille à l’étranger. »
On ne sait pas exactement si Gamal et Alaa Moubarak sont actuellement en Égypte ou à l’étranger.
Hosni Moubarak a été évincé en 2011 après la révolution égyptienne, des centaines des milliers de manifestations avaient émaillé tout le pays pendant dix-huit jours, exigeant la fin de son règne autoritaire de 30 ans.
Après son éviction, le président, ses deux fils Alaa et Gamal, ainsi que des cadres de son gouvernement ont été accusés de diverses infractions liées à la corruption et à la répression des manifestations. Leurs actifs en Suisse ont été gelés dès la démission de Moubarak.
Un coup aux partisans de la révolution de 2011
Mais dans les années qui ont suivi le putsch qui a évincé Mohamed Morsi, premier président élu démocratiquement en Égypte, les Moubarak ont été acquittés par les tribunaux égyptiens de la plupart des charges pesant sur eux entre 2015 et 2020.
Ces acquittements ont porté un coup aux partisans de la révolution de 2011, qui demandaient que le gouvernement de Moubarak soit tenu responsable de la corruption et de la répression des droits de l’homme sous son régime.
Récupérer les « milliards volés » du gouvernement était l’une des principales exigences du mouvement protestataire.
La plus haute cour d’appel égyptienne a également acquitté Moubarak en mars 2017 : il était accusé d’avoir tué des manifestants lors de la révolution de 2011, au moins 840 personnes avaient été tuées et 6 000 blessés par les forces de sécurité qui avaient violemment dispersé les manifestants.
Le ministre de l’Intérieur de Moubarak Habib el-Adly et quatre de ses conseillers ont été acquittés des mêmes inculpations.
Le tribunal pénal du Caire a également acquitté Alaa et Gamal Moubarak concernant l’obtention illégale, avec d’autres, de plus de deux milliards de livres égyptiennes (environ 135 millions d’euros) dans une affaire surnommée dans les médias « manipulation boursière ».
En mai 2015, les deux frères et leur père ont été condamnés pour détournement de fonds publics réservés à la rénovation des palais présidentiels et d’avoir utilisé ces fonds pour leur domicile privé. Ils ont purgé leur peine de trois ans de prison pour ces inculpations.
Pour Amnesty International, Moubarak a laissé un « héritage marqué par la torture systématique et la détention arbitraire » ainsi que l’impunité des forces de sécurité pour les atteintes aux droits de l’homme qui restent profondément ancrées en Égypte.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
Middle East Eye propose une couverture et une analyse indépendantes et incomparables du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et d’autres régions du monde. Pour en savoir plus sur la reprise de ce contenu et les frais qui s’appliquent, veuillez remplir ce formulaire [en anglais]. Pour en savoir plus sur MEE, cliquez ici [en anglais].