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Guerre à Gaza : à quoi s’attendre après les audiences de la Cour internationale de justice ?

Si des « mesures provisoires » peuvent être attendues dans les semaines à venir, la décision finale sur l’affaire de génocide contre Israël portée par l’Afrique du Sud pourrait prendre des années
Le public à l’intérieur de la Cour internationale de justice le jour du procès à La Haye, le 10 janvier (Reuters)
Par MEE

La Cour internationale de justice (CIJ) a fermé ses portes vendredi après deux jours d’audience publique de l’affaire opposant l’Afrique du Sud à Israël.

Alors qu’Israël rejette farouchement les accusations de l’Afrique du Sud pour violation de la convention des Nations unies sur le génocide dans sa guerre brutale à Gaza, des questions subsistent quant à la suite des événements.

Les Palestiniens et leurs soutiens du monde entier espèrent que la CIJ, souvent surnommée la « Cour mondiale », sera en mesure de mettre un terme aux activités destructrices d’Israël dans la bande de Gaza. Plus de 24 100 Palestiniens ont été tués, dont deux tiers de femmes et d’enfants.

C’est la première fois qu’Israël est jugé au regard de la convention des Nations unies sur le génocide, qui a été élaborée après la Seconde Guerre mondiale à la lumière des atrocités commises contre les juifs et d’autres minorités persécutées au cours de l’Holocauste.

Quelles sont les prochaines étapes ?

Après s’être réunie à La Haye pour les audiences, la Cour doit décider si les allégations portées par l’Afrique du Sud contre Israël relèvent ou non de la convention sur le génocide. Cette convention constitue le premier traité relatif aux droits de l’homme adopté par les Nations unies en 1948.

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Une décision provisoire en faveur ou contre la demande urgente de l’Afrique du Sud devrait être rendue dans les semaines à venir. Cette ordonnance est une mesure d’urgence qui peut être mise en œuvre avant le début de l’affaire principale.

Le premier jour de l’audience publique, Pretoria a demandé à la CIJ de se prononce sur une mesure provisoire visant à « suspendre immédiatement les opérations militaires d’Israël à l’intérieur et à l’encontre de Gaza ».

L’État africain a souligné que ces mesures étaient essentielles « pour se prémunir contre de nouvelles atteintes graves et irréparables aux droits du peuple palestinien en vertu de la convention sur le génocide, qui continuent d’être violés en toute impunité ».

Les mesures provisoires sont-elles exécutoires ?

Si la CIJ peut éventuellement décider d’une ordonnance provisoire, Israël est libre de l’ignorer.

Les décisions provisoires rendues par la CIJ sont en théorie juridiquement contraignantes, mais elles sont généralement non exécutoires, car la Cour n’a pas le pouvoir de les mettre en œuvre. Toutefois, elles peuvent nuire considérablement à la réputation de l’État en question.

À titre d’exemple récent de mesure provisoire ignorée, la CIJ a rendu en 2022 un arrêt ordonnant à la Russie de « suspendre immédiatement les opérations militaires entamées le 24 février 2022 sur le territoire de l’Ukraine ». L’affaire est toujours en cours.

En théorie, la CIJ pourrait donc rapidement statuer en faveur de l’Afrique du Sud et ordonner l’arrêt immédiat de la campagne militaire israélienne à Gaza, mais sans grand changement sur le terrain.

Toutefois, si elle est soutenue, une ordonnance provisoire pourrait signifier que les Palestiniens sont protégés contre ce qui pourrait être reconnu comme un génocide.

Quand la décision finale sera-t-elle rendue ?

Les négociations de la CIJ impliquent des requêtes écrites longues et détaillées, qui sont généralement suivies d’arguments et de contre-arguments de la part des représentants légaux de chaque État. Les juges décident ensuite du verdict final.

On estime que l’affaire Afrique du Sud-Israël devant la CIJ pourrait se poursuivre pendant quatre ans.

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En 2019, la Gambie, avec le soutien de l’Organisation de la coopération islamique, a intenté une action devant la CIJ contre le Myanmar, l’accusant d’avoir commis des actes de génocide à l’encontre de la population rohingya dans l’État de Rakhine, dans le nord du pays.

En 2022, les juges ont voté à quinze voix contre une que la Gambie avait le droit de porter l’affaire devant la Cour en vertu de la convention sur le génocide de 1948.

Un an plus tôt, la CIJ avait exclu l’adoption de mesures provisoires à l’encontre de la Birmanie, qui demandaient à la junte militaire de cesser de commettre un génocide à l’encontre des Rohingyas. Aucun verdict final n’a encore été rendu.

De nombreux experts estiment que ce précédent a ouvert la voie à une action en justice de l’Afrique du Sud contre Israël.

Traduit de l’anglais (original) par Imène Guiza.

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