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La tragédie passée sous silence des Turkmènes d’Irak réduites à l’esclavage par l’État islamique

Comme les yézidies, ces femmes ont été capturées par centaines par le groupe État islamique en 2014. Mais les familles et les responsables locaux ferment les yeux
Une yézidie et ses enfants enlevées par l’État islamique mais ayant réussi à s’enfuir. Contrairement aux yézidies, aucun effort particulier n’a été déployé pour libérer les Turkmènes chiites (Reuters)
Une yézidie et ses enfants enlevées par l’État islamique mais ayant réussi à s’enfuir. Contrairement aux yézidies, aucun effort particulier n’a été déployé pour libérer les Turkmènes chiites (Reuters)

Note de la rédaction : ce reportage de Suadad al-Salhy, correspondante pour Middle East Eye en Irak, a été publié pour la première fois en anglais le 18 février 2021. La journaliste a reçu pour ce reportage le prix de la meilleure journaliste de l’année aux Drum Awards des médias en ligne le 29 avril 2022.

Les efforts pour libérer les yézidies et leurs enfants réduits en esclavage par le groupe État islamique (EI) ont reçu le soutien et l’attention de la communauté internationale, et ont même remporté un prix Nobel de la paix.

En revanche, le silence et le déni des dirigeants locaux ont privé des centaines de femmes turkmènes de confession chiite également kidnappées par l’EI en 2014 de la possibilité d’être libérées, de tourner la page et d’obtenir justice, rapportent à Middle East Eye des responsables, activistes et organisations de défense des droits de l’homme irakiens.

L’offensive brutale et meurtrière de l’EI sur le nord-ouest de l’Irak en août 2014 est souvent désignée par l’expression « génocide yézidi », du fait du meurtre de près de 3 000 membres de cette communauté et de l’asservissement de 7 000 autres.

Mais les centaines de femmes turkmènes également emmenées en captivité passent presque inaperçues au milieu de tous ces crimes.

La plupart d’entre elles sont des chiites originaires de la commune rurale à prédominance turkmène de Tal Afar, à 80 kilomètres à l’ouest de Mossoul. Elles ont été enlevées à Sinjar, ville voisine à majorité yézidie où elles avaient trouvé refuge avec leurs familles après la prise de contrôle de Tal Afar par l’EI plusieurs semaines auparavant.

Des familles turkmènes chiites irakiennes qui ont fui Tal Afar se reposent à Shanghal, une ville de la province de Ninive, en juin 2014 (Reuters)
Des familles turkmènes chiites irakiennes qui ont fui Tal Afar se reposent à Shanghal, une ville de la province de Ninive, en juin 2014 (Reuters)

La grande majorité d’entre elles ne sont même pas recensées comme disparues, selon les responsables et activistes. Aucun véritable effort officiel n’a été entrepris ni aucune campagne non-gouvernementale lancée pour les rechercher et les ramener chez elles, bien que des informations indiquent clairement qu’elles se trouvent dans des camps dirigés par les forces turques et kurdes en Syrie.

« Légalement, ces femmes [kidnappées] n’existent pas, car leurs familles les déclarent tuées par l’EI ou simplement absentes », indique à Middle East Eye Hayman Ramzi, directeur de l’organisation Tulay pour les Affaires turkmènes.

« Les hommes des familles des victimes refusent souvent de déclarer qu’une de leurs filles a été kidnappée. »

Face au silence, l’organisation Tulay n’a commencé à voir apparaître l’ampleur des enlèvements qu’avec le temps.

« À force de travailler sur le sujet, on découvrait par hasard ici et là qu’une femme avait été kidnappée, lorsqu’un parent éloigné en parlait », déclare Ramzi. 

« Les familles de ces femmes refusent d’admettre qu’elles ont été kidnappées par l’EI. On recevait des menaces de mort de certaines d’entre elles lorsqu’on leur disait avoir des informations confirmant qu’une de leurs membres avait été kidnappée. »

Des chiffres incertains

Il est quasiment impossible de connaître le véritable nombre de Turkmènes disparues.

Le déni des familles et « l’aveuglement délibéré » des hommes au sein de la communauté, ainsi que l’assentiment des institutions gouvernementales influentes et des forces religieuses et politiques chiites, entravent toute tentative d’enquête.

Les forces religieuses et politiques ont même, d’après les activistes pour les droits de l’homme et certains responsables, mis fin à toute tentative sérieuse de libérer ces femmes et de les rendre à leurs familles.

Certaines associations locales de défense des droits de l’homme rapportent à MEE que selon leurs estimations, 540 civils de Tal Afar sont portés disparus, dont 125 femmes. Vingt-deux d’entre elles, qui étaient détenues dans un orphelinat de Mossoul dirigé par l’EI, ont été libérées par les forces irakiennes lorsque ces dernières ont pris la ville en octobre 2017.

« La plupart des femmes kidnappées n’ont pas fait l’objet d’une enquête, et personne ne les a recherchées, alors il n’y a aucune initiative gouvernementale, internationale ou civile pour les ramener »

- Nawal al-Karawi, directrice du Centre irakien pour les droits des femmes et des enfants

Cependant, les organisations internationales de défense des droits de l’homme et leurs partenaires fédéraux irakiens se concentrant sur Tal Afar et œuvrant à ramener les déplacés indiquent que le total de personnes disparues s’élèverait en réalité à 1 200, dont 600 femmes. 

Jusqu’à présent, 131 d’entre elles ont été libérées. La plupart l’ont été grâce à des initiatives individuelles : des familles qui paient des rançons aux militants qu’ils ont contactés via des médiateurs s’attachant à libérer des yézidies détenues par l’EI en Syrie.

« La plupart des chiffres annoncés sont faux », affirme Nawal al-Karawi, directrice du Centre irakien pour les droits des femmes et des enfants, qui travaille à Tal Afar en collaboration avec d’autres organisations depuis des années.

« La plupart des tribus refusent de déclarer officiellement le kidnapping de leurs filles. Ils considèrent cela comme une honte, alors ils refusent de le révéler. »

Sans tentative sérieuse de mettre en lumière le problème, aucune instance gouvernementale dédiée n’a été mise en place pour suivre le dossier des disparues, contrairement aux autres communautés.

« La plupart des femmes kidnappées n’ont pas fait l’objet d’une enquête, et personne ne les a recherchées, alors il n’y a aucune initiative gouvernementale, internationale ou civile pour les ramener », déplore Karawi.

Piégées en Syrie

MEE a pu consulter une correspondance entre le Haut-Commissariat irakien pour les droits de l’homme (IHCHR), le Secrétariat général du conseil des ministres irakien et la Commission parlementaire pour les droits de l’homme. Celle-ci montre que les responsables n’ont qu’une vague idée du nombre de femmes turkmènes disparues. 

Leur échange indique que, selon eux, on est sans nouvelles de plus de 450 de ces femmes, qui ont été emmenées en Syrie, en Turquie et dans des États arabes du Golfe.

La plus récente de ces communications remonte au 29 décembre 2020. On y apprend que le ministère des Affaires étrangères était en négociation avec le ministère des Déplacements et des Migrations, les services de renseignement et plusieurs missions diplomatiques irakiennes pour « enquêter » sur le sort des « Turkmènes kidnappées et des survivantes ».

Selon cette lettre, les services de renseignement ont confirmé la présence de femmes turkmènes en Syrie dans des camps dirigés par les Forces démocratiques syriennes (FDS), notamment al-Sadd à Raqqa, Abu al-Khashab et Abu Hamam à Deir ez-Zor, al-Hol à Hassaké et Akkadha dans la ville d’Azaz.

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La lettre suggère également que certaines de ces femmes ont tenté de fuir en Turquie mais ont été arrêtées par les forces turques et envoyées dans la prison d’Afrin à la frontière syro-turque. Middle East Eye a interrogé les autorités de l’opposition syrienne à Afrin pour en avoir confirmation, mais nos sollicitations étaient restées sans réponse au moment de la publication.

Ce courrier ne donne aucune information concernant le nombre de femmes susceptibles d’être détenues à Afrin ou leur état de santé. Si elle précise que le ministère des Affaires étrangères a demandé aux missions diplomatiques de chercher à établir qui sont ces femmes, la lettre dit clairement que celles-ci ne sont pas parvenues à obtenir de « quelconques informations pertinentes ».

Pour ceux qui recherchent ces femmes turkmènes, ce courrier constitue une avancée.

« C’est la première fois depuis des années que nous recevons une réponse officielle à notre correspondance avec les institutions du gouvernement sur ce sujet », explique à MEE Ali Akram al-Bayati, membre de l’IHCHR et directeur de l’Organisation de sauvetage des Turkmènes.

« Au bout du compte, on a la preuve que certaines de ces filles sont toujours en vie et ont été déplacées [en Syrie] », ajoute Bayati.

« Lorsque j’ai reçu cette information, j’étais heureux parce que cela signifie qu’on a une chance de les sauver. Mais dans le même temps, cela m’a vivement contrarié car nous vivons dans l’ombre d’un État qui ne se soucie pas des personnes, de leur sort et de leur souffrance. »

Sollicité à propos de cette correspondance avec l’IHCHR, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Ahmed al-Sahhafa a promis de répondre après avoir contacté le responsable du service des droits de l’homme de son ministère. Au moment de la publication, il n’avait pas répondu. 

Déni

Tal Afar, à 450 kilomètres au nord de Bagdad, est une grande ville située près des frontières turque, irakienne et syrienne.

Comme la plupart des villes du nord de l’Irak, c’est une société tribale, conservatrice et fermée. Les femmes y sont considérées comme un symbole de l’honneur d’un homme, son côté tendre qui ne doit pas être touché ou approché.

Pour de nombreux hommes au sein de cette société si conservatrice, admettre que leurs épouses ou leurs filles ont été kidnappées et violées est l’aveu qu’ils n’ont pas été capables de les défendre, un symbole d’impuissance et de honte.

Les militants et responsables locaux expliquent à MEE que le déni et l’ignorance volontaire du sort de ces femmes constituent une tentative visant à continuer à avancer sans avoir à gérer les conséquences.

« Ils ne révèlent aucune information qui pourrait aider à contacter ou identifier leurs filles kidnappées. Ils se sentent honteux et embarrassés. Ils savent que l’EI a violé ces femmes et ils ne peuvent pas supporter l’idée ni vivre avec »

Salem Geddo, Orphan Charitable Foundation

Certains hommes refusent même de reconnaître les femmes qui ont été mises en sécurité.

De nombreux activistes des droits humains racontent avoir reçu des photos ou des noms d’Irakiennes libérées en Syrie et avoir demandé aux familles turkmènes si elles pouvaient aider à les identifier. La plupart des hommes ont refusé d’identifier les femmes susceptibles d’appartenir à leur famille.

« Lorsqu’on leur montre les photos qu’on reçoit, ils s’énervent et nous disent : “Ces femmes sont mortes, alors pourquoi insistez-vous pour exhumer ce sujet ?” », rapporte à MEE Salem Geddo, directeur d’Orphan Charitable Foundation à Tal Afar.

« Certains regardent la photo pendant quelques secondes sans s’y arrêter vraiment, puis disent avec colère “Ce n’est pas notre fille”, bien que les traits de leur visage montrent clairement leur réticence à identifier la personne sur les photos.

« Ils ne disent pas qu’on ne doit plus les appeler, mais ils ne révèlent aucune information qui pourrait aider à contacter ou identifier leurs filles kidnappées. Ils se sentent honteux et embarrassés. Ils savent que l’EI a violé ces femmes et ils ne peuvent pas supporter l’idée ni vivre avec. »

Des violences sexuelles pour « humilier et soumettre »

Les violences sexuelles perpétrées par le groupe EI constituent une tactique délibérée et systématique pour humilier ses opposants et anéantir leur identité culturelle.

Dans un rapport sur les violences sexistes établi par l’association irakienne al-Amal, le célèbre groupe de défense des droits des femmes explique : « Le corps des femmes est souvent considéré comme un symbole de l’identité culturelle des sociétés. Les humilier et les soumettre [est un moyen d’]humilier et [de] soumettre leur société. »

Les militants de l’EI considèrent les communautés et cultes qui ne respectent pas leur interprétation extrémiste de la religion, tels que les chiites, avec un mépris meurtrier, les qualifiant d’apostats.

Les responsables, activistes et chefs tribaux à Tal Afar ont raconté à MEE que, comme pour les yézidis, l’EI avait tué tous les hommes et garçons turkmènes de plus de 12 ans et les avaient jetés dans le puits d’Allau Anter, un trou d’environ 50 mètres de diamètre et de 100 mètres de profondeur, situé au nord de Tal Afar.

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Les responsables fédéraux irakiens estiment que les restes de plus d’un millier de personnes reposent dans cette fosse commune. Au moins 400 d’entre eux sont des Turkmènes chiites, tandis que les autres sont des yézidis.

« Rien ne nous prouve que des Turkmènes ont été tuées, bien que de nombreuses survivantes yézidies ont témoigné que les militants violaient les Turkmènes et les brûlaient après ça ; nous n’avons pas trouvé de restes pour l’instant », indique Bayati à MEE.

« Toutes les preuves et informations disponibles suggèrent que le nombre de femmes turkmènes tuées est assez faible, contrairement aux hommes et aux enfants de plus de 12 ans. »

Les méthodes du groupe État islamique sont recensées dans les témoignages de survivantes yézidies et turkmènes.

Elles ont raconté que les militants demandaient à chaque garçon de retirer leur t-shirt et de lever les bras, tuant immédiatement quiconque avait des poils sous les aisselles.

Des enfants irakiens nagent dans la rivière dans la ville dévastée de Tal Afar en septembre 2019 (Reuters)
Des enfants irakiens nagent dans la rivière dans la ville dévastée de Tal Afar en septembre 2019 (Reuters)

Un célèbre sociologue irakien, qui a étudié les répercussions de l’asservissement des femmes yézidies et turkmènes sur leurs communautés depuis 2014, explique à MEE que l’EI a utilisé cette tactique « pour infliger le plus de mal possible à ses opposants chiites ».

Les dirigeants religieux, gouvernementaux et politiques chiites sont convaincus que l’EI a gardé ces femmes en vie pour « remuer le couteau dans la plaie », exposant les sensibilités autour des femmes pour les ébranler et « dénaturer leur identité culturelle de façon immuable et indélébile », indique le sociologue, qui souhaite rester anonyme pour des raisons de sécurité.

« La mentalité des hommes chiites veut que ces femmes meurent et disparaissent à jamais. Ils veulent que le temps s’arrête au moment de leur kidnapping, car ils ne veulent pas savoir ou affronter ce qui s’est passé ensuite pour elles »

- Un sociologue irakien

D’après lui, les dirigeants chiites sont pleinement conscients de ce à quoi ces femmes ont été soumises, mais estiment que c’est un affront envers la communauté dans son ensemble, et ne peuvent ni ne veulent donc l’accepter.

« La mentalité des hommes chiites veut que ces femmes meurent et disparaissent à jamais. Ils veulent que le temps s’arrête au moment de leur kidnapping, car ils ne veulent pas savoir ou affronter ce qui s’est passé ensuite pour elles », ajoute-il.

« Les femmes sont la prunelle de leurs yeux alors ils veulent oublier cet incident ou nier ce qui s’est passé. Mais la présence des victimes les en empêche. »

Marginalisées

Depuis quelques années, les forces chiites d’Irak dominent la politique et la sécurité du pays et contrôlent la plupart de ses ressources humaines et financières. Elles ont utilisé ces ressources considérables pour libérer les yézidies retenues captives par l’EI. En revanche, elles n’ont presque rien investi pour libérer les femmes turkmènes chiites.

En réalité, elles ont utilisé ces mêmes ressources pour dissimuler le problème et tenter d’éloigner la presse mondiale et les organisations de la société civile internationale, regrettent des responsables, des législateurs ainsi que des activistes.

En outre, depuis 2015, les chiites au Parlement s’efforcent d’empêcher toute référence explicite aux femmes chiites kidnappées dans le projet de loi visant les violences sexistes commises par les militants de l’EI.

Les forces politiques chiites prennent soin de présenter la tragédie des femmes turkmènes comme une part marginale du génocide yézidi et de ne pas distinguer clairement leur situation désespérée, d’après des législateurs.

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Les gouvernements chiites successifs, y compris l’actuel, ont rencontré et soutenu les survivantes yézidies et leurs familles. Mais les représentants des femmes turkmènes et leurs proches n’ont pas été reçus plus de trois fois, confie à MEE un responsable fédéral impliqué dans ce dossier. Lors de deux de ces réunions, les survivantes turkmènes ont été présentées comme faisant partie des délégations yézidies, selon des activistes et des responsables.

Les 22 Turkmènes libérées de l’orphelinat de Mossoul et ramenées à Tal Afar n’ont pas bénéficié d’une réinsertion, n’ont pas reçu de soins officiels ni de compensation, bien qu’elles vivent dans « une grande précarité » et souvent avec des parents éloignés car leur famille proche a été tuée ou capturée, rapporte Ramzi, de l’organisation Tulay.

Les groupes de défense des droits de l’homme qui s’occupent d’elles sont peu nombreux, disposent de peu de fonds et sont au maximum de leurs capacités.

Le seul soutien offert à ces femmes, c’est un versement mensuel de 100 000 à 300 000 dinars (56–170 euros) de la fondation pour les orphelins associée au grand ayatollah Muhammad Saeed al-Hakim, l’une des plus grandes autorités religieuses chiites de Nadjaf, indiquent des activistes à MEE.

« En fait, aucune position gouvernementale n’a été adoptée ces dernières années concernant les survivants turkmènes ou les femmes kidnappées », déclare un responsable fédéral qui a travaillé sur ce dossier.

« Les pouvoirs publics considèrent que ce sujet est une tragédie sociale qui a eu lieu dans un pays musulman qui a du mal à accepter ou à vivre avec », ajoute-t-il.

« Les pouvoirs publics ne veulent pas embarrasser [les chiites], alors ils ferment les yeux et considèrent cela comme un sujet local sensible dont les solutions doivent être apportées loin des projecteurs. »

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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