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Les illusions perdues des Palestiniens après la visite de Biden

Pour les Palestiniens qui espéraient que Washington pousse Israël à faire des concessions, voir la délégation de Joe Biden s’envoler pour l’Arabie saoudite vendredi après une brève rencontre avec Mahmoud Abbas est une déception
Le président américain Joe Biden est reçu par le président palestinien Mahmoud Abbas au complexe présidentiel de la Mouqataâ à Bethléem, en Cisjordanie occupée le 15 juillet 2022 (AFP/Mandel Ngan)
Le président américain Joe Biden est reçu par le président palestinien Mahmoud Abbas au complexe présidentiel de la Mouqata'a à Bethléem, en Cisjordanie occupée, le 15 juillet 2022 (AFP/Mandel Ngan)
Par AFP à BETHLÉEM, Palestine occupée

La visite récente en Israël et en Cisjordanie occupée du président américain Joe Biden, qui s’est déclaré « sioniste » dès son arrivée, a déçu les Palestiniens. Désabusés, ils critiquent un manque d’action de l’administration Biden pour résoudre le conflit avec Israël.

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« C’est comme dans les années Trump mais avec le sourire », commente à l’AFP un responsable palestinien ayant requis l’anonymat, en allusion aux positions jugées pro-israéliennes de l’ex-président américain.

Donald Trump avait notamment reconnu la ville disputée de Jérusalem comme capitale d’Israël et y avait déplacé l’ambassade des États-Unis, une décision vécue comme un affront côté palestinien et sur laquelle n’est pas revenue Joe Biden.

Rares étaient ceux qui attendaient que le président de 79 ans relance le processus de paix, au point mort depuis 2014.

Pour autant, certains responsables palestiniens nourrissaient le timide espoir que Joe Biden tienne sa promesse de campagne en annonçant la réouverture du consulat américain pour les Palestiniens à Jérusalem-Est, fermé par l’administration Trump en 2019.

Les Palestiniens veulent faire de la partie orientale de Jérusalem, occupée depuis 1967 et annexée en 1980 par Israël, la capitale de l’État auquel ils aspirent.

Aucune position sur l’expansion des colonies juives

Annoncer la réouverture du consulat aurait pu constituer un « coup de fouet » pour relancer les négociations de paix, estime un autre responsable palestinien sous couvert d’anonymat.

M. Biden a certes réitéré son soutien à la « solution à deux États », un État palestinien viable aux côtés d’Israël. Et lors d’un point presse avec le président palestinien Mahmoud Abbas à Bethléem en Cisjordanie, il a déclaré qu’il devait y avoir « un horizon politique pour le peuple palestinien ».

« Nous n’abandonnerons jamais le travail en faveur de la paix », a-t-il ajouté. 

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Mais si Joe Biden a plaidé pour un « État palestinien indépendant » avec une « continuité territoriale », il a toutefois affirmé que les conditions n’étaient actuellement pas réunies pour relancer le processus de paix israélo-palestinien. 

Il n’a proposé aucun plan de fond sur la question de l’occupation israélienne et n’a pas pris position concernant l’expansion des colonies juives en Cisjordanie, territoire palestinien qu’Israël occupe depuis 1967. Un sujet pourtant cher à l’administration de l’ex-président Barack Obama, dont Joe Biden était le vice-président, déplorent les responsables palestiniens.

M. Biden s’est contenté de rencontrer des dirigeants des deux camps, annonçant des aides financières aux Palestiniens et un projet pour déployer la 4G en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, autre territoire palestinien, dirigé par les islamistes du Hamas et sous blocus israélien.

Dès son arrivée en Israël, Joe Biden a déclaré « qu’il n’était pas nécessaire d’être juif pour être sioniste », une formule peu commune dans la bouche d’un dirigeant américain, malgré le soutien actif des États-Unis envers Israël depuis sa création en 1948.

« Il arrive en Israël et se qualifie de sioniste, puis il vient en Palestine et refuse de parler des questions fondamentales du conflit », fustige l’un des deux responsables palestiniens interrogés par l’AFP.

Dimanche, le Premier ministre palestinien, Mohammed Shtayyeh, a dénoncé l’inaction américaine.

« Comme d’habitude, il ne nous reste que des miettes »

- Issa Abu Ayash, un Palestinien de Bethléem

« Si, comme le président américain l’a dit, la solution [à deux États] est actuellement hors de portée, alors il doit y avoir immédiatement un gel de la construction des colonies, conformément au droit international et aux résolutions pour préserver le droit du peuple palestinien à son État indépendant », a déclaré Mohammed Shtayyeh.

Pour Tahani Mustafa, analyste à l’International Crisis Group (ICG), la visite de Joe Biden « n’a laissé aucune indication sur le fait que la situation du peuple palestinien ait sa place dans l’agenda de son administration ».

Pour les Palestiniens espérant que Washington puisse pousser Israël à faire des concessions, voir la délégation de Joe Biden s’envoler pour l’Arabie saoudite vendredi après une brève rencontre avec Mahmoud Abbas a été décevant.

« Comme d’habitude, il ne nous reste que des miettes », déclarait à l’AFP vendredi Issa Abu Ayash, un Palestinien de Bethléem, alors qu’il regardait à la télévision les images du cortège présidentiel se dirigeant vers l’aéroport. « Nous sommes si faibles ici ».

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